Convoitise ? …
Première lettre de St Jean (2, 12-17) :
« N’aimez pas le Monde, ni ce qui est dans le Monde.
Si quelqu’un aime le Monde, l’amour du Père n’est pas en lui.
Tout ce qu’il y a dans le Monde -la convoitise de la chair, la convoitise des yeux, l’arrogance de la richesse-
tout cela ne vient pas du Père, mais du Monde.
Or le Monde passe, et sa convoitise avec lui.
Mais celui qui fait la volonté de Dieu demeure pour toujours. »
Jean ne nous invite pas à vivre loin de tout, ni à détester nos semblables…
mais de réfléchir nos pensées, nos paroles et nos actes conformément à la Parole de Dieu.
De même la « chair » n’est pas méprisable : Dieu Lui-même a « pris chair » en Jésus,
et notre Credo affirme : « je crois en la résurrection de la chair »…
La chair est noble et respectable, elle a une valeur spirituelle.
Qu’est-ce que la chair ?
La chair c’est l’ensemble des moyens humains permettant « d’entrer en relation avec… »
Ainsi le regard (qui peut interroger ou exprimer) et le sourire (qui dévoile l’intention),
les mains (qui donnent, reçoivent, partagent, accueillent),
les pieds (qui permettent « d’aller vers »), la voix, l’intelligence, le corps, tout cela est « chair ».
La « chair » a été donnée pour aimer, pour grandir et s’unir à Dieu.
La « chair » serait un stade préparatoire à la vie dans l’Esprit, auprès de Dieu.
Saint Jean nous met surtout en garde contre la convoitise : envier, désirer s’approprier, idolâtrer, chosifier…
« Convoiter la « chair » prend ici le sens de « convoiter le corps », dans sa composante sexuelle,
la convoitise étant introduite par le regard et confortée par le pouvoir matériel (« arrogance de la richesse »)
La convoitise risque de réduire l’Être Humain à l’état d’objet, ou de proie -à des fins de plaisir égoïste- oubliant l’infini respect qui lui est dû.
Mais il existe bien d’autres convoitises humaines tout aussi dangereuses : le pouvoir et la domination, le confort et le bien-être, l’argent…
Rien n’est bon, rien n’est mauvais : tout dépend l’intention qu’on y met.
Le P. Teilhard de Chardin nous invite dans son livre « Le Milieu Divin » à envisager la puissance spirituelle de la matière qui peut servir de marchepied à l’Homme pour s’approcher de Dieu…
« Mais que seraient nos esprits, mon Dieu,
s’ils n’avaient le pain des objets terrestres pour les nourrir,
le vin des beautés créées pour les enivrer,
l’exercice des luttes humaines pour les fortifier ?
Quelles énergies misérables, quels cœurs exsangues vous apporteraient vos créatures,
si elles parvenaient à se couper prématurément du sein providentiel où vous les avez placées ! Expliquez-nous, Seigneur, comment nous pouvons, sans nous laisser séduire, regarder le Sphinx. »
La « chair » est « matière ».
Elle aussi peut aider à l’écoute, à la compassion, au partage, au don, au soutien, à l’accueil, à l’admiration, à la prière, à la louange, SI …
si elle est portée, vécue en Jésus, par Lui, et en Lui, vers le Père.
La chair doit être conquise par l’enfant,
servir l’adulte à développer l’Amour vrai,
puis préparer le vieillard -en s’effaçant progressivement- à atteindre la vie définitive auprès de Dieu, dans l’Esprit.